Être professeur de danse

Enseigner la danse, ce n'est pas de tout repos ! Comment faire face à l'inattendu ? Comment placer sa voix ? Comment gérer le timing d'un cours ?

3/ Utilisez la totalité de votre cerveau

Il faut bien plus qu’un bon plan pour enseigner efficacement. Bon nombre des conseils précédents relèvent de votre pensée rationnelle (« verticale »). Pour autant, je pense qu’un bon cours est à la fois logique et intuitif et résulte d’un équilibre parfait entre les approches horizontale et verticale dans vos cours.

Un des aspects de l’enseignement latéral est d’accorder autant d’importance à votre intuition du moment qu’au plan de cours que vous avez préparé. Plutôt que de suivre à la lettre votre programme, n’hésitez pas à suivre votre instinct si celui-ci diffère de votre plan.

Pour accéder ce mode de réflexion, détendez-vous. Vous pouvez, à votre convenance, méditer juste avant le cours, ou simplement tenter d’apaiser votre esprit. Vous serez alors nettement plus apte à sentir l’évolution de la classe, et moins coincé dans votre schéma de cours.

Observez attentivement les danseurs pour voir ce qu’ils ne comprennent pas. C’est comme suivre une conversation avec une réelle attention. Ne suivez pas simplement une formule ou un plan. Un enseignement efficace est à la fois donneur et receveur. Évidemment, l’enseignement relève plus du don, mais vous devez tout de même être observateur et faire preuve de perspicacité dans vos observations.

On m’a souvent demandé : « en quelles proportions suis-tu ton plan, et en quelles proportions improvises-tu ? » J’improvise tout le temps, à 100%, sur la base d’un plan de cours solide et de plusieurs plans de secours. En d’autres termes, notre priorité la plus haute est d’être attentif à la classe pour voir ce qu’ils intègrent, à quel rythme, en insérant des détails imprévus pour régler les problèmes, en sautant des éléments déjà maîtrisés et donc superflus. Soyez 100% préparés (le plan du cours), et donc 100% attentif au déroulement du cours, et prêt à changer spontanément de plan si besoin.

Willam Christensen, fondateur du San Francisco Ballet, disait qu’un programme (un plan de cours) rendait un mauvais professeur meilleur, mais un bon professeur pire. C’est vrai, mais je recommande tout de même de ne pas sauter cette étape. Préparez un programme comme ligne directive, et adaptez-le au besoin au fur et à mesure de votre classe.

4/ Le timing d’un cours

Les paragraphes suivants sont valables à la fois pour la création d’un plan de cours (pensée verticale) et les adaptations spontanées au fil du cours (pensée latérale).

Soyez ponctuel.

Commencez et terminez votre cours à l’heure. Vos élèves peuvent avoir un autre rendez-vous, et vous en voudront (à juste titre) de les mettre en retard.

Dépasser les horaires prévues vous fera paraître comme désorganisé et incapable de mettre en place un plan de cours réaliste. Vous pourriez croire que ce dépassement est la preuve de votre enthousiasme pour votre sujet, mais aux yeux de vos élèves, cela ne passera que pour de la mauvaise préparation.

Prévoyez la juste quantité d’information.

En prévoyant votre cours, prenez garde à ne pas essayer d’en couvrir trop, ou trop peu. En fait, ne vous inquiétez pas outre mesure si vous n’en prévoyez pas assez. Beaucoup de professeurs débutants commettent l’erreur de prévoir trop de matière pour leurs cours.

Assurez-vous que chaque cours ou thème possède une conclusion satisfaisante.

Stages de plusieurs jours

D’un autre côté, si vous faites un cours sur plusieurs jours, il est plus efficace de quitter vos élèves sur un challenge plus compliqué, en leur promettant de le résoudre le lendemain. Cette difficulté non résolue leur restera dans un coin de la tête, et leur subconscient aura partiellement résolu la difficulté d’ici là. Cela rend souvent le cours du lendemain plus positif.

En préparant votre cours, n’oubliez pas de prendre en compte le niveau d’énergie/réveil de vos élèves. Ils seront prêts pour un contenu très stimulant le matin, en bonne forme physique mais légèrement somnolant après le repas du midi, et à la fois mentalement et physiquement exténués à la fin de la journée, particulièrement après 16h30.

Dans un atelier s’étalant sur une journée complète, leur attention commencera à diminuer au bout de deux heures, même le matin. Assurez-vous que vous avez prévu quelque chose pour garder leur concentration élevée à ce moment.

Le premier cours d’une journée peut facilement durer 75 minutes voire 90 minutes. En revanche, faites en sorte que les ateliers de l’après-midi soient plus courts (environ 1 heure), car la capacité de concentration diminue. Un bon moyen de garder l’attention décroissante de l’après midi est de faire preuve d’humour !

N’endormez pas vos élèves en fin de journée avec un contenu trop lent. Le meilleur choix est alors quelque chose de physiquement prenant, mais de mentalement accessible.

5/ Autoportrait du professeur

La source de l’autorité est l’authenticité. Votre crédibilité est directement liée à la perception de votre authenticité par vos élèves. Certains professeurs ne réussissent pas car ils essayent de se donner une image qui ne leur correspond pas. Ce que vous êtes réellement touchera toujours plus que tout ce que vous pourrez dire.

▶ ▶ Accordez plus d’importance au succès de vos élèves qu’à votre image.

Ne soyez pas vaniteux : le cours ne tourne pas autour de vous mais de vos élèves.

Néanmoins, il faut que vous réalisiez que votre réputation compte à leurs yeux. Ils veulent être assurés que vous êtes compétent, et qu’ils ne perdent pas leur temps en se rendant à votre cours. Vous devez gagner leur respect. Trop de modestie ou de dénigrement peut être aussi préjudiciable que de la suffisance ou de la vantardise. Cela peut engendrer des doutes chez les élèves : « Ai-je fait un mauvais choix ? Ce professeur n’a pas l’air sûr de lui, peut-être devrais-je suivre un autre cours à la place de celui-ci ? »

Votre langage corporel doit transmettre de la confiance en vous et de l’assurance par rapport à votre sujet. Ne vous décomposez pas si vous vous trompez. Ne soyez pas trop sur la défensive à propos de votre image quand vous faites une erreur, prenez-le avec humour. Soyez honnête à propos de ce que vous ne savez pas.

Ne vous excusez pas de l’enseignement que vous offrez. J’ai déjà entendu un professeur dire « J’imagine que beaucoup d’entre vous ne reviendront pas demain ». Attention, je ne vous dit pas de ne pas vous excuser. Comme expliqué précédemment, si vous faite une erreur, admettez-le, plutôt que d’essayer vainement de la cacher ou de rejeter la faute. Vous pouvez être à la fois confiant et authentique, sans qu’il n’y ait de conflit.

Associez votre autorité avec une atmosphère détendue, pour mettre vos élèves à l’aise.

Pourquoi les mettre à l’aise ? Comme mentionné plus tôt, ils seront plus heureux et apprendront beaucoup plus vite s'ils restent proche de leur zone de confort. Mais si vous êtes troublé, votre inconfort se transmettra à vos élèves.

Projection vocale

Parlez de manière audible, clairement et fort, sans crier ni de manière stridente.

Dans une grande pièce, parlez un peu plus lentement, car la réverbération rend un discours rapide plus confus.

Faites fluctuer votre ton de voix, utilisez des contrastes. Autorisez vous à rire, ou au moins soyez d’un naturel avenant.

Je préfère être légèrement détendu, et non dynamique au point de sembler hyperactif. Je recommande un ton autoritaire mais calme. Souvenez-vous, vous voulez gardez vos élèves dans leur zone de confort. L’anxiété trouble le processus d’apprentissage. Néanmoins, vous ne pouvez pas éviter que l’apprentissage d’une nouvelle danse bouscule les élèves, et devienne une source de frustration et d’anxiété. Il est important d’utiliser un ton calme et apaisant.

Articulez — ne marmonnez pas. Prononcez tout clairement, sans crisper votre visage, bouche ou cou.

Un bon exercice de prononciation est de sur-articuler à haute voix l’alphabet juste avant le début du cours. J’utilise cet exercice pour sortir de ma voix habituelle vers ma voix articulée de cours.

Faites des exercices vocaux avant votre cours, pour préserver votre voix. Un bon exercice est d’effectuer un bâillement relâché descendant, de manière répétitive (dans le couloir, avant la classe).

Utilisez un microphone pour une classe de plus de 40-60 élèves, à la fois pour préserver votre voix et pour mieux vous faire entendre.

▶ Si vos élèves ne peuvent pas vous comprendre (parce que vous marmonnez) ou vous entendre (parce que vous ne parlez pas suffisamment fort), ils assumeront que ce que vous dites n’est pas important et ne vous prêteront pas attention.